SNOW WHITE.
Croque la pomme et endors toi. Demain sera plus brillant.
Il se trouvait dans le parc depuis la veille au soir. Il ne se souvenait pas comment il était arrivé ici mais il s'y plaisait bien en réalité. Il se souvenait être sorti de l'internat pour aller rejoindre une bande de majordomes plus intéressants que les autres du fait de leurs manières souvent sauvages et outrageuses. Il les avait suivi dans la ville, dans les bars et les quelques boites qu'ils connaissaient. Ils avaient un peu bu, mais Derek tenait bien l'alcool, alors que ses camarades étaient partis à moitié nus courir dans les rues, il était retourné vers l'institue. L'internat était fermé alors, et il était parti se promener dans le Parc. Il avait été saisi par le silence ambiant, qui - sans être parfait - le berçait et semblait calmer son humeur. Alors il s'était assis dans l'herbe humide et avait regardé le ciel. Seules quelques rares étoiles étaient visibles à cause de la lueur de la ville non loin. Souriant, il avait longuement observé la lune. Il aimait la couleur de la lune, elle était particulière, et lumineuse surtout. La lune n'avait pas de couleur, elle n'était que lumière aux yeux de Derek. Il ne cachait pas son amour pour la lune, sa fascination pour elle. Il n'avait pas vu le temps passer, puis la lune s'était effacée doucement. Il avait perdu son sourire, et regardé le soleil se lever doucement. L'aurore, l'aube, le matin. Soupirant, il s'était préparé à une nouvelle journée dans cette école qu'il n'aimait pas.
Puis il se souvint que nous étions dimanche. Il n'avait pas bougé. Prenant son téléphone portable il écrivit rapidement un message :

Bonjour Cousine, j'espère que vous avez bien dormi. Si vous aviez la gentillesse de m'apporter quelques cookies, ou un muffin, cela me ferait le plus grand bien car je crains fort d'avoir oublié de manger. Je me trouve dans le Parc. Que diriez-vous d'un petit déjeuner en ma présence ?

Il l'envoya à sa cousine, la belle Innocent Snowhite, et regarda autour de lui. Il ne se trouvait pas loin des potagers et des arbres fruitiers. Se levant - difficilement - il alla cueillir deux belles pommes rouges, et quelques fruits de saison. Un pique-nique pour bien commencer la journée, en présence de la seule personne qui soit au niveau de son perfectionnement. Il adorait sa cousine, vraiment. Plus encore elle était la seule femme qu'il aimait vraiment et qu'il ne considérait pas comme un simple objet. Elle arriva, belle comme le jour, et il l'accueillit avec un sourire charmeur.
— Bonjour belle Déesse, Lady Snowhite. Puis-je vous offrir cette belle pomme rouge ?
Demanda-t-il en tendant une des deux pommes en direction de la Lady, l'invitant à se joindre à lui et à s'assoir à son côté pour déjeuner.

SNOW WHITE.
Croque la pomme et endors toi. Demain sera plus brillant.
Une fois, sa cousine et lui se trouvaient dans la villa immense d'un client de son père, en Hollande. Il se souvenait de cette maison parce qu'elle était si grande qu'ils n'avaient pas eu le temps d'en faire le tour. Ils devaient sans doute avoir un peu moins de dix ans, et c'était en été. Il s'en souvenait parce que c'était une des rares périodes où il pouvait profiter entièrement de sa cousine. Ils avaient grandi ensemble. Elle, elle était la petite soeur qu'il n'avait jamais eu, qu'il pouvait protéger et aimer comme un fou. Il n'arrivait pas à imaginer sa vie loin d'elle, ils formaient un couple complémentaire et parfait. Il serait son majordome parfait il le savait, et elle était une des rares Lady qu'il prenait plaisir à servir. Parfois il la servait, pendant quelques jours, et ils recevaient alors les louanges de leur professeurs. Elle le canalisait, elle lui permettait d'être plus doux, plus calme, et plus soft. Il ne parlait pas autant, il ne cherchait pas autant à échapper à l'ennui, entièrement tournés vers les envies et les désirs de sa cousine. Et elle, connaissant son aptitude à vite s'ennuyer et à chercher des moyens pour se changer les idées, chercher toujours quelque chose à lui faire faire. Les professeurs semblaient presque rassurés quand ils voyaient Derek tourner autour de sa cousine. Certain mettait même en doute l'innocence de leur relation, mais tous les deux ne se posaient pas ce genre de question sur la décence.
Passons, ce n'était pas le sujet de départ. De fait, il se souvenait de cette maison lors de sa jeunesse. Ils y étaient allés tous les deux peut être durant quatre ou cinq ans d'affilés. Il se souvenait que parfois, le matin, alors que le soleil était à peine levé, il réveillait Innocent, et la menait à travers l'immense terrain forestier de ce propriétaire. Ils prenaient une immense nappe, et des pommes, et ils allaient dans une clairière, au bord d'un ruisseau, où ils jouaient à être des grandes personnes, riches. Ils parlaient correctement, et si il jouait à être un majordome, elle faisait déjà sa lady. Très jeunes ils avaient joué ce rôle. Ca les faisait rire. Une fois, fatigués, ils s'étaient endormis sur cette nappe, collés l'un contre l'autre sous la douce lumière du soleil, bercés par le son de la rivière qui coulait non loin d'eux. Ils avaient été réveillés par le bruit d'une biche qui mangeait leurs pommes. Sans bougés ils avaient ouvert les yeux et l'avaient observée. Mais Derek avait éternué... La biche était parti. Il se souvenait de cela comme du souvenir le plus heureux de sa vie. La seule fois où il avait été capable de ne rien faire et d'en être heureux.
Aujourd'hui, il sentait encore cette sérénité quand il était près d'Innocent. Mais elle n'était pas pour lui. Il était en train de former un jeune majordome pour la lady. Derek devra trouver une autre lady, mais il n'en avait pas le désir pour le moment. Il voulait sa cousine, il n'aimait qu'elle. Elle était la seule qui trouvait grâce à ses yeux, elle était parfaite simplement.
— Je vous remercie mon cher, vos compliments m'honorent.
Dit la belle blonde alors qu'elle venait vers lui, belle comme le jour. Il sourit en l'observant, alors qu'elle venait s'assoir près de lui. Elle prit la pomme qu'il lui présentait avec de la poser sur l'herbe verte. Elle était tout simplement sublime et il souriait, éblouie et réchauffé par sa simple présence. Il se sentait soudainement moins fatigué, même si sa nuit blanche lui donnait l'impression d'avoir cent ans. Il pouvait tout supporter pour un sourire d'Innocent.
— Ces compliments sont largement mérités, chère Cousine ~
Continua-t-il en prenant sa main pour la baiser. Elle récupéra cependant sa main et présenta un petit panier à son cousin. Elle avait la beauté parfaite d'une lady. Cela frappa soudainement Derek. Elle était une lady, c'était un fait inexorable. Elle en avait la prestance et la grâce, la beauté et les manières. Il sourit, se rendant compte que sa cousine avait grandi. Qu'elle n'avait plus besoin de jouer à être la lady. Elle l'était devenue.
— Si je me souviens bien, tu m'avais demandé d'apporter quelque chose pour te nourrir, toi qui est Ô combien affamé.
Il se mit à rire et observa l'intérieur du panier qu'elle lui présentait. Il en eut l'eau à la bouche. oh mon dieu ! que cela semblait appétissant ! Il prit un muffin et l'observa. Il les reconnut, il s'agissait des muffins de ce cher patisser du centre-ville. Les meilleurs sans aucun doute, et aucun majordome n'avait les capacités - pour le moment - de les surpasser. Il s'était mis en tête d'en voler la recette pour pouvoir - si ce n'est les surpasser - les égaler au moins.
— J'espère que ceci te plaira mon cher cousin. Comment vas-tu ? Tu n'as pas fais trop de folies j'espère.
Il croqua dans la patisserie, et laissa échapper un gémissement de plaisir. Oui, Dieu que c'est bon ! rien n'était meilleur qu'un muffin auprès d'Innocent c'était un fait. Il avala - trop rapidement à son gout - le morceau et se tourna vers Innocent.
— Parfait, chère Cousine, comme souvent tu es tout simplement parfaite. Te dire que je vais bien serai mentir, une nuit blanche comme celle-ci aura raison de moi un jour. Et toi ma chère comment vas-tu ?
Dit-il en souriant. Il ne pouvait pas lui mentir, quant bien même il essayerait elle ne serait pas dupe, il le savait. Innocent le connaissait et le comprenait mieux que tout le monde. Il avait parfois l'impression qu'elle voyait à travers lui grâce à un détecteur de mensonge hyper sophistiqué. Il ne pouvait pas se battre contre cela.
— Savais-tu que les pauvres allaient boire dans des endroits très bruyants des boissons étranges roses fluos ? Je l'ignorais ! Et ils dansent sur des musiques très répétitives, habillés avec des haillons ridicules. C'est un spectacle très... Bestiales, et fascinant.
Dit-il en continuant à manger son morceau.

SNOW WHITE.
Croque la pomme et endors toi. Demain sera plus brillant.
Aucune femme était aussi belle que sa cousine aux yeux de Derek. Quand il était enfant, il ne disait pas qu'il était amoureux de sa maman, comme tant de petits enfants pouvaient le faire. Il disait qu'il était amoureux de sa cousine, qu'il se marierait avec elle, et qu'ils auront de beaux enfants. Qu'il sera son amoureux . Il disait cela avec tout la candeur et la sincérité d'un enfant émerveillé par la beauté et la gentillesse d'une cousine qui restait constamment avec lui, et faisait parti de son paysage, et ce qui faisait son bonheur. Il était serein aux côtés d'Innocent. Il était heureux aux côtés d'Innocent, il lui semblait soudainement que le monde était simple, que rien n'avait d'importance parce qu'elle était encore là, parce qu'elle l'aimait encore, parce qu'elle prenait soin de lui, parce qu'elle veillait encore sur lui. Parce qu'ensemble ils pouvaient tout faire, personne n'était plus fort qu'eux, il en était convaincu. Auprès d'elle il était sur de lui, il savait qu'il pouvait tout faire, qu'il pouvait tout devenir. Elle l'accepterait, elle le pousserait, elle serait là, comme toujours. Elle était la femme de sa vie. Ils souffraient ensemble...
Il avait été le seul à savoir pour cet homme qui l'avait tant faite souffrir. Quand elle était parti en France avec lui, quittant sa famille et sa richesse, Derek avait pris un avion et l'avait suivie. Il s'était caché. Deux mois plus tard, elle avait découvert que ses comptes était presque à sec, que son homme profitait de son argent, qu'il était dépendant aux jeux, à la drogue, et à d'autres produits. Qu'il se vantait de la beauté de cette femme si naive. Une blonde sans cervelle, un corps qu'il pouvait toucher comme il l'entendait sans se soucier de ses sentiments. Elle l'avait quittée, Derek l'avait attendu en bas de son hôtel. Il se souvient de ce moment. Elle venait de quitter son homme, qui l'avait frappé sous le coup de la colère. Elle était en larme, elle était perdue et honteuse. Elle était sortie, complètement anéantie, et l'avait trouvé sur le trottoir, adossé à un taxi, l'attendant. Elle s'était jetée dans ses bras, sans rien dire. Il l'avait serré, et ils étaient rentrés à l'hôtel de Derek où il lui avait prendre une douche, poser un glaçon sur sa joue, et l'avait bercée jusqu'à ce qu'elle s'endorme. Durant les trois heures qui suivirent il retourna à l'hôtel. Il ne lui raconta jamais ce qu'il y avait fait. Mais jamais plus elle n'avait eu à s'inquiéter de voir cet homme revenir. Depuis il la surprotégeait, empêchant tout homme qui n'avait pas sa confiance l'approcher.
Le temps avait passé, mais il savait que la blessure était profonde, et toujours présente. Elle n'avait confiance qu'en lui. Pour le moment il était sans doute le seul homme à la connaitre vraiment, parfaitement. Le seul homme à la voir telle qu'elle était vraiment sous son masque de froideur et de dureté.
— Tu sors trop mon cher cousin. Fais attention à toi tout de même. Même si je ne peux t’empêcher de t'amuser ! Tout va bien pour moi je te remercie.
Il sourit. Il la reconnaissait bien là. Toujours inquiète, à s'assurer qu'il aille bien, à lever les yeux au ciel en sachant ce qu'il faisait la nuit, quitte à rester tout le nuit dans un parc car l'Internat avait fermé. Il vivait dangereusement ~
— Je devrais peut être me calmer en effet, et devenir sage. Mais tu sais combien je peux m'ennuyer chère Cousine ~
Dit-il comme seule excuse. après tout il n'en avait pas d'autre. Il s'ennuyait constamment. Il n'était pas dépressif, il le savait. Il arrivait encore à trouver du bonheur dans la vie. Mais il avait une capacité de concentration très courte. Il avait constamment besoin de changer de sujet, de voir des choses différentes, de découvrir de nouvelles choses. Il ne pouvait pas se contentait de la routine. La routine le tuait et le rendait terne. Il avait besoin de mouvement. Il ne pouvait pas rester immobile. L'immobilité c'est la mort.
Il lui fit par de ses découvertes dans le monde des prolétaires. Il ne comprenait pas vraiment leur manière de vivre. Il ne comprenait pas ce monde qui lui était trop éloigné.
— Je ne pensais pas que tu trouvais un divertissement dans ce genre de chose mon cousin. Mais tu as toujours aimé... Te fondre dans la masse pour observer les pauvres, je vois qu'avec le temps ce passe temps n'a pas changé.
Il se mit à rire, en mangeant un autre muffin tout à fait succulent - bien qu'il soit moins bon que ceux que sa cousine faisait elle-même.
— Tu as raison, certaines choses sont vouées à ne jamais changer. Et toi chère cousine ? Comment vis-tu cette seconde année à Aster ? Aucun Majordome n'a encore retenu ton attention n'est-ce pas ?